Très décriée pour son fonctionnement et ses délais anormalement longs , la procédure prud’homale a été réformée par la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques du 6 août 2015, dite Loi MACRON.

La loi étant succinte sur ce point, tous étaient dans l'attente du décret d’application.

C’est chose faite avec le décret du 25 mai 2016 qui détaille les modalités de la réforme.

Les difficultés principales rencontrées par la justice prud’homale sont:

- son délai de traitement anormalement long (à Aix en Provence, plus d' 1 an pour avoir un jugement du Conseil des Prud'hommes et 2 ans supplémentaires en cas de renvoi en formation de départage, outre un délai moyen de 1 an et demi à 2 ans en appel)

Comment expliquer à un salarié licencié pour faute grave, privé de son indemnité de licenciement, de son indemnité de préavis et donc de toute ressource salariale du jour au lendemain, qu'il devra attendre en moyenne 3 ans pour que son affaire soit définitivement jugée par la justice prud'homale?

- les grandes disparités de décisions d’une juridiction à l’autre

- un taux d’appel très élevé de près de 70% des décisions de première instance.

Autant dire que la justice prud’homale, qui se voulait une justice de proximité, ancrée dans le monde professionnel, ne répond absolument pas aux besoins des salariés, comme des employeurs, qui cela étant, peuvent, dans un certain nombre de cas, trouver avantage à ces délais déraisonnable pour différer le paiement des indemnités qui seraient consacrées par la justice prud'homale .

Que va apporter la nouvelle procédure devant la justice prud'homale?

La procédure sera essentiellement écrite

La saisine du Conseil des Prud'hommes se fera à présent par voie de requête remise au greffe, devant contenir les mentions prescrites par l'article 58 du NCPC et un exposé sommaire des motifs et des chefs de celle-ci, et accompagnée d'un bordereau de pièces

Les parties devront s'échanger leurs pièces avant l'audience de conciliation

Les conclusions devront être établies par écrit

Augmentation des pouvoirs du Bureau de Conciliation, rebaptisé Bureau de Conciliation et d’Orientation (BCO)


- Le Bureau pourra être chargé de la mise en état: cette pratique existe cependant déjà dans un certain nombre de conseil des prud'hommes

- Le Bureau pourra procéder à toute mesure d'instruction: mettre en demeure les partie de produire des pièces, procéder à l'audition de toute personne

-le Bureau pourra statuer sur le fond du dossier si le défendeur ne comparaît pas

- le bureau est compétent pour statuer sur les contestations relatives à l'incompétence de la section

- le bureau est compétent pour homologuer un accord issu un mode de résolution amiable des différends

Réforme de la procédure de renvoi devant le Bureau de Jugement
:

Le BCO a la possibilité de fixer l’affaire en Bureau de Jugement en formation restreinte de deux conseillers, laquelle devra statuer en moins de trois mois, ou en Bureau de Jugement de quatre conseillers (fonctionnement actuel), ou bien en Bureau de Jugement en formation de départage si le salarié et l’employeur donnent leur accord. Le projet est louable mais seule la pratique à venir démontrera s’il y a effectivement une amélioration des délais. Les professionnels du droit restent dubitatifs si cela n'est pas accompagné de magistrats supplémentaires, seuls en mesure d'obtenir une diminution notable des délais de traitement des dossiers

En matière de licenciement économique, le Bureau de Jugement devra statuer dans un délai ne pouvant excéder six mois à compter du moment où l’affaire est renvoyée (trois mois en formation restreinte), mais le texte ne prévoit pas de sanction

Réforme de la procédure devant la Cour d'Appel:

La procédure devant la Cour d’appel est également modifiée car la procédure, jusqu’alors « sans représentation obligatoire » devient une procédure « avec représentation obligatoire » avec utilisation obligatoire de l’E-BARREAU lorsqu'il s'agit d'un avocat

Un nouveau représentant des parties: le défenseur syndical

La loi crée ce statut particulier. Les défenseurs syndicaux auront la possibilité de défendre les employeurs ou les salariés devant la justice prud'homale.

L’essentiel des modifications introduites par ce décret est applicable à compter du 1er août 2016. Décret du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail :

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/5/20/JUSC1509239D/jo/texte/fr

POUR ALLER PLUS LOIN:

Rapport du Président de la Cour de Cassation:

http://www.justice.gouv.fr/publication/rap_lacabarats_2014.pdf

LOI MACRON du 6 août 2015:

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2015/8/6/2015-990/jo/texte